4/12/2012

La chambre d'enfant

Il a ouvert les yeux dans un couffin rose et merveilleux. Tendre. Tiède. Confortable. Il se sent en sécurité. C'est la douceur des nurseries et des chambres d'enfant. Quelques secondes de mise au point et la faim se fait déjà sentir. Tout est pour le mieux dans le meilleur des mondes. Les parents ont prévu ce qu'il fallait. Il le sait. Il le sent. Il est confiant. Après son nez et ses yeux, se sont ses mâchoires qui entrent en action. Quel plus efficace moyen de découvrir le monde ? Il y a là de quoi devenir grand et fort. Devenir quelqu'un. Papa et maman ont bien fait les choses. Merci papa et maman. C'est si bon de naître dans une charogne.

2 commentaires:

G.MAR a dit…

On entre en société avec toutes ses civilités dès qu’on pose la voix sur nous, petit corps inconscient de lui-même, bouche ne cherchant pas encore les mots mais simplement la tétée, petit animal dérisoire et sans nom connu par lui… Et cette voix, alors même qu’on ne la comprend pas, vagues gazouillis provenant d’un dehors qu’on ne sait même pas distinguer, est déjà un jugement. Il est beau le baigneur, il ressemble à son père. Ah non moi je trouve qu’il ressemble à sa mère, par le nez. Et les oreilles ? Non ça c’est son père, il les a décollées… La petite masse informe de chair sans nom se forme par la voix des autres. Pâte molle on lui reconnaît un visage dans celui de ses prédécesseurs terrestres. Ça y est, c’est l’enfer ! Et pour toujours… tiraillé dans le double-bind du jugement : faut qu’on ressemble à quelqu’un ou a quelque chose d’humain et vite et personne ne s’entend… Et ces couilles qu’il a nom de Dieu ! Plus grosses que la tête… On nous plonge dans le cycle des générations à la vue du kiki, futur reproducteur – déjà mort par la descendance qu’on lui devine nombreuse, petits et arrière-petits-enfants à l’infini…. Ressuscité futur dans des boules de chair XX ou XY à peine a-t-on lâché le premier cri. Et pas besoin de paroles, la langue des gestes maternels et les onomatopées suffisent. Guiliguilguili… le pire des jugements sans doute ! On veut qu’il comparaisse sur le champ !, fœtus de conscience, impersonnel, quitte qu’à ne remuer qu’un pied. Il ne répond pas à nos mots mais il a déjà le pied qui bouge, regardez ! Premier pas dans l’essence de l’humanité. Le logos contracté par stimuli-chatouillis. Il parlera bientôt pas d’inquiétudes à avoir : il bouge. Dialogue par frottement de la voûte plantaire et risettes. On nous laisse pas tranquille. Les chatouilles ça fait mal. On n’a pas encore baillé qu’à entendre tout ce bruit autour pour nous tirer de notre néant on ne souhaite déjà plus qu’un bon sommeil bien ivre et définitif dans les couches. Qu’on nous les lâche avec toutes les attentes, tous les rêves d’humanité, toutes leurs demandes de réponse. On ne veut pas des mots, poisons qu’on nous déverse dans l’oreille, qu’on nous laisse chier dans nos langes et c’est tout ! Qu’on n’éduque surtout pas nos sphincters pour nous tenir propre sur la scène politique. Impossible. On n’a pas de mots pour s’exprimer. Pas de revendications encore. On est damné de tous les temps.

thoams a dit…

C'est si bon de naître dans une charogne !