(...)
Accroupi
dans l'herbe au bord du cercle noir et sale d'un ancien feu de jardin,
Joseph trempe ses deux doigts tendus dans la cendre. La matière,
blanche et grise, humide et froide, colle comme du pastel gras. A la
manière du dernier des mohicans face à son ultime matin, il dresse un
regard fier vers le lointain en traçant sur ses joues deux diagonales de
neige sale. Des peintures de guerre avec les restes d'hier. Voilà de
quoi se préparer pour la chasse. Et le fait que le gibier qu'il vise
soit un paquet de chamalow géants ne change rien à l'affaire. La tortue
lunaire et ses moustaches en chocolat seront son animal totem. Le grand
esprit des âges farouches pue de la bouche, sera son incantation
chamanique. Noé est à ses côtés, spirituellement parlant bien sur. Il
prend des notes sur un papier sale
dans la cabane afin de lui enseigner à son retour les rudiments d'un
bon chasseur guerrier. Pour ce qui est du lance-pierre, un bon Y, bien
échancré. Compte 15 centimètres pour le pieds et quinze pour les
branches, maximum, en tout les cas moitié-moitié, d'un bois solide, le
chêne ou le châtaignier. Des graviers ronds et une chambre à air
doublée. Pour un arc, privilégier un bois souple, le noisetier pour
commencer, mais il casse en séchant. L'If est un bon arbre aussi, par
contre il demande plus de travail.
Certaines lames de bambou font parfaitement l'affaire. Une corde pas
trop épaisse, ficelle tressée finement, chanvre ou lin, ou fil de pèche
pour les plus ambitieux. Quant aux flèches : osier, noisetier, saule,
bambou, peuplier. Bien droites c'est ça l'important. Une entaille d'un
côté, une
pointe de l'autre, pour les plumes et la tête de flèche, y'a pas non
plus marqué Yakari sur mon front, faudra se débrouiller. Ça va saigner.
(...)
(Extrait d'un roman en cours : Le Daron Perché)
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