5/12/2018

Pirouette cacahuète et éternité

J'ai un caillou vert dans la poche
un cadeau de mon fils
je le garde toujours
le sens contre ma cuisse
en m'asseyant devant mon bureau
pendant que le jour escalade le silence
le lapin cage ouverte
va crotter sur le canapé
je suis seul dans le dépli des ombres
ou le dépit des hommes
à regarder longtemps
la peau de planète
lisse et grêlée
météorite douce
d'une vieille coquille d'amande
dans le matin qui se lève
je voudrais parler du temps qui passe
de ce que ça fait à l'amour
de ce que ça fait à nos corps et à nos vies
les mots papier de verre
qui nous rabotent le coeur
nos vieux jeux de sorciers
la patine nous rendant glissants
comme des cuirs de reptile
filante entre les doigts
impossible
à retenir
mais qui aussi
de temps en temps
nous arrondit
les angles des yeux
en forme de douceur
Même quand on ne se comprend pas
je veux vieillir avec toi
l'amour ça vit toute une vie
voilà ce que je sais
c'est un peu con d'écrire
ce genre de trucs
je veux vieillir avec toi
l'amour ça vit toute une vie
voilà ce que je sais
et puis j'ai ma fierté
barbue et tatouée
alors je commence par dire
le caillou vert
les crottes de lapin
et l'amande météorite
par ce poème
je trampoline
pirouette jusqu'à la patine
et retombe sur mes pattes
sous les applaudissements des oiseaux
sans troubler le moins du monde
tes petits ronflements
de sorcière bien aimée

1 commentaire:

Anonyme a dit…

Mon frère qui est cuisinier dans la marine reprend les jeunes officiers qui débarquent la fleur au fusil, encore tout imbus de leurs galons, dans sa cuisine pour avoir un petit en-cas, en commençant leur phrase par "Je veux ..", par "Ici on ne veut pas, on caresse l'espoir".

Il y en a qui se promènent avec des chapelets dans leur poche, d'autres avec une pierre verte offerte par leur fils, d'autres encore avec des bouts de papier sur lesquels ils ont griffonné un poème, je ne sais pas qui sont les plus heureux, le tout est peut-être de ne pas avoir les poches pleines de vide.