Un matin je me lève et j'aime tout

 Un matin je me lève et j'aime tout. Le moindre caillou mouillé, le moindre trou de boue. Les bols sur la table. Et le soleil qui brille. Et les trilles du givre. Je me lève et j'aime tout. Le miel qui colle. Le nez qui coule. Les pattes prudentes de la poule. Le pigeon qui se coiffe. Le ballon qui dégonfle. Et la buée, cette belle petite buée, qui joue à rendre de l'épaisseur à l'invisible. Un matin je me lève, je trouve là où il faut mes douleurs, mes enfants, mon café, mes fenêtres, mes faiblesses, mes possibles. Je rentre d'un voyage qui recommence chaque nuit d'un navire inconnu vers une île confuse. Je débarque, m'agenouille et trempe mon doigt dans le matin. Je retrouve ce goût mêlé de sel, d'herbe trempée, de peau d'enfant, de terre, de miel. Cette odeur de cheveux sous les couvertures. J'aime tout. Saleté de poule qui fiente sur la terrasse. Le chat du voisin, si je le chope cette carcasse. Qui est allé dans les chambres avec ses chaussures pleines de cague ? Y'a rien à bouffer à midi. Il caille aujourd'hui et les bûches sont trempées. Schrek est passé dans les toilettes. C'est un concours de chaussettes sales ? Ho ça va, on peut dire Ta gueule sans être énervé. Je crois que j'ai ma dent qui s'infecte encore. Demain réveil à six heures. Y'a plus de masques ni de beurre. Tu devais pas aller courir ? J'ai mal au bide. Pose ce téléphone. J'aime tout.