J'étais là à me débattre entre les poubelles, les idées sombres et les steaks hachés crus. Mes pieds déjà bien enfoncés jusqu'aux chevilles dans cette drôle de matinée gadouillée de mort et de lumière. Et je le vois sur la terrasse. Posé là, sans bouger. Je passe, repasse, il ne bouge pas. Un coup sur la vitre, il ne bouge pas. Je me dis ola merde il est mort ou quoi ? Non il est debout sur ses deux minuscules pattes, beau comme une braise prête à s'envoler. Je me dis bon, il doit être mal en point. j'ouvre la porte fenêtre, terrasse froide par les pieds, suis en chaussettes, l'automne commence à chauffer. Je m'approche, m'accroupis, il ne bouge pas. Il est là bien, vivant. Rouge gorge immobile, impassible, impavide. Beau comme une braise prête à s'envoler. Je tend le bras, la main, le doigt. Je le caresse tête, dos, ailes. Il ne bouge pas. Je caresse une braise. Sa petite tête d'une douceur sans nom qui pourrait être broyée d'un claquement de doigt. Ses yeux, deux points noirs, d'un noir du fond de l'espace, parfaitement rond, total, brillant. Un bec en aiguille qui pourrait denteler la nuit. La flamme sur son ventre. Je n'en reviens pas, pense à prendre un photo mais ça ferait trop de gestes, l'instant s'écroulerait. Je me dis le pauvre, il doit être mal en point. Malade, pas loin d'y passer. Je vais chercher une boite, de la paille, de l'eau, du pain. J'y vais. Une fois tout rassemblé je reviens, il est là. Je distingue une fiente sur le carrelage de la terrasse derrière ses pattes brindilles. J'ouvre la porte et il s'envole d'un coup, comme une flèche, une flèche souple, une flèche qui aurait appris à danser. Et voilà, je reste là, avec la fiente, le froid du carrelage par les chaussettes, le soleil qui monte sur le mur, la mort embourbée. J'ai caressé une braise et elle s'est envolée
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