Vos discours m’ennuient. Vos cris me font peur. Vos mots
n’ont pas de sens pour moi. Pour vous, la parole est une arme, un couteau de
cuisine, une calculatrice. Pour vous, parler c’est payer ou réclamer des
comptes, acheter des sourires ou des larmes comme des fruits chauds dans un
stand au bord de la route. Ce voyage est interminable. Comme si les vacances
refusaient de commencer. Vous êtes en train de vous engueuler à l’avant, de
vous dévorer sous prétexte de combler la chaleur immobile. Vos mots n’ont que
des dents. Lucie est à côté de moi, sa cuisse contre la mienne, le casque sur
les oreilles. Elle écoute une chanson de suicidaire en regardant au fond du
ciel, derrière le paysage de la route qui défile. Elle a trouvé sa technique.
Elle n’écoute plus depuis longtemps. Elle bouche par des couches de musique
l’espace entre elle et vous. Moi, je crois que je vais tenter autre chose, je
vais offrir mon âme au silence. A partir d’aujourd’hui, je me tais.
(extrait de Collection de Sombreros, un ensemble de micro-fictions qui devrait avoir une nouvelle vie chez Nuit Myrtide l'année prochaine)
2 commentaires:
Lien vers ici et baleines là-dedans > http://accheron-enmarges.blogspot.fr/2013/08/notes-et-choses-vues-entendues-pont-2.html
merci !
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