2/04/2011

Et ça tourne et ça tourne

Y’a les gitans à la poste. Une grande queue de gitans qui vient retirer des sous. Souvent c’est la mère ou la grand-mère. Elle est seule. Elle est petite. Elle tient des enfants. Deux, trois, quatre enfants. Elle se fait engueuler parce qu’ils courent partout. Qu’ils touchent les objets de la boutique de la poste. Y’a l’employée de la poste qui les regarde genre mais c’est pas possible des trucs pareils. Et elle leur gueule dessus.
Y’a l’employée de la poste. Elle est blonde. Elle est grosse. Elle doit avoir la quarantaine. Elle souffle parce qu’elle a chaud. Elle répète 20 fois les mêmes trucs mais personne ne veut comprendre. C’est comme ça. C’est pas sa faute si c’est comme ça. Elle est là pour dire que c’est comme ça. Elle se fait engueuler toute la journée pour des histoires de lettres, de chèques, de délais, d’horaires. Elle se fait gueuler dessus. C’est une éponge qui sert à amortir les gueulantes. C’est son boulot de se faire gueuler dessus par cette vieille dame qui trouve que c’est une honte et que le service publique et que non  madame et que restez polit.
Y’a cette vieille. Elle met trois heures à aller chercher sa pension à la poste. À aller faire son petit marché. À traîner sa carcasse. Elle est seule comme la mort. Les gens passent à toute vitesse à côté d’elle. L’évitent de justesse. Elle est toute blanche. Elle est toute grise. Des fois les minos de l’immeuble crachent dans son dos et elle le remarque même pas. Elle se trimballe toute seule avec son crachat dans le dos. Elle pue. Chez elle ça pue. Personne ne veut y aller à part l’infirmière.
Y’a les minos de l’immeuble. Ils traînent sans avoir rien à foutre. Ils jouent dans le local à poubelle. Ils cassent des trucs. ça fait du bien de casser des trucs. Ils bouffent de la merde tous les jours. Ils regardent la télé. Parfois le flic municipal les ramène chez eux et dit aux parents que ça va pas aller. Les parents ils disent oui mais on n’est pas là. Le flic y dit c’est pas mon problème. Les parents y disent on comprend pas y z’ont tous ce qu’i faut. On se casse le cul pour leurs baskets et leurs consoles et leurs télés. Le flic y dit c’est de la graine de rien. Si c’était moi une bonne bouffe dans la gueule.
Y’a le flic municipal. Il picole. Il tourne en rond dans son express. Il voulait résoudre des crimes et faire le bien. Il va au stand de tir. Il constate les dégâts des containers qui ont brûlés. Il pose des pv. Il met des barrières. Il picole. Lui ce qu’il aime c’est les cerfs-volants. Personne croit qu’un flic ça peu aimer les cerfs-volants. C’est une éponge à merde. Il est là pour encaisser les coups entre les gens et le système. C’est qu’un pauvre flic.
Y’a tout ce beau monde qui tourne en rond dans la cuvette tiède des jours. Tout ça tourne et ça tourne et ça tourne. Et ça tourne comme on dit que le lait a tourné. Et ça s’ennuie ça survit ça se débrouille ça fait ce que ça peut. Et ça dort une nuit sur deux. Et ça rêve une nuit sur quatre. Et ça tourne et ça tourne et ça tourne. Et ça a envie de tout brûler, ou de voter front nationale, ou de se tirer une balle dans le crâne, ou de prendre ce qu’on agite sous leur nez. Et ça se dit que Putain il en faut un putain de courage pour pas devenir moins qu’une bête.
...

3 commentaires:

titi a dit…

là, chapeau bas...

Anonyme a dit…

Oui
C'est bien

Anonyme a dit…

Oui
C'est même très bien
(n'avais pas signé)
J'ai cru revoir ma poste et mon quartier ou d'anciens

val lisant